L’immonde détournement d’un mandat.
7 janvier 2020, David Bedein
Vous trouverez ci-dessous le rapport du CNEPR (Center For Near East Policy Research) sur l’utilisation abusive par l’UNRWA des fonds des donateurs.
Le mandat de l’UNRWA a été renouvelé par l’Assemblée générale de l’ONU au cours de ces 70 dernières années, et son mandat actuel doit expirer le 30 juin 2020. Cependant, alors que d’autres pays rejoignent les rangs de ceux qui refusent de renouveler ce gouffre financier et administratif connu sous le nom d'”UNRWA”, la poursuite de cette mascarade du “refugié-isme perpétuel” doit être remise en question.
Ce document examine l’augmentation exorbitante et fortement gonflée des demandes budgétaires de l’UNRWA au cours des dix dernières années (1,11 milliard de dollars US pour la seule année 2018), ainsi que le mauvais usage et le manque total de transparence et de responsabilité quant à la manière dont ces milliards de dollars ont été dépensés.
- Aperçu historique
Le 14 mai 1948, le British Colonial Office a officiellement mis fin au mandat britannique de 30 ans pour la Palestine. L’évacuation chaotique du personnel civil et militaire britannique fut immédiatement suivie d’une invasion par sept pays arabes qui jurèrent d’anéantir l’État d’Israël nouvellement créé. Au cours de la guerre arabo-israélienne de 1948, environ un million de personnes, des Arabes et des Juifs, furent déplacées et sans abri. Au lendemain de ces événements, l’Assemblée générale des Nations Unies a réagi, dans le cadre de la crise des réfugiés qui a suivi la Seconde Guerre mondiale, en demandant aux organisations internationales telles que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) d’apporter une aide humanitaire aux réfugiés.
- Création de l’UNRWA
Six mois après la guerre, en novembre 1948, l’ONU a créé l’Office des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine (UNRPR) pour apporter aide et secours aux réfugiés arabes qui ne sont pas restés sous souveraineté israélienne et pour coordonner les efforts des ONG et des autres organes de l’ONU. En décembre 1948, l’ONU a créé l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA), en tant qu'”organe subsidiaire de l’ONU”. L’UNRWA s’est vu attribuer les actifs de l’UNRPR et a repris les dossiers d’enregistrement des réfugiés du CICR.
III. Le mandat de l’UNRWA
Selon le site internet de l’UNRWA, l’agence de l’ONU a été mandatée à l’origine pour “mener à bien des programmes directs de secours et de travaux en collaboration avec les gouvernements locaux, consulter les gouvernements du Proche-Orient concernant les mesures à prendre pour préparer le moment où l’assistance internationale pour les projets de secours et de travaux ne sera plus appropriée, et planifier le moment où les secours ne seront plus nécessaires”.
Tous les autres efforts des Nations Unies en matière d’aide aux réfugiés dans le monde sont gérés par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) qui est chargé, dans le cadre de son mandat spécifique, “d’aider ses réfugiés à éliminer leur statut de réfugié par l’intégration locale dans le pays hôte, la réinstallation dans un pays tiers ou le rapatriement lorsque cela est possible”. (exergue du rédacteur).
Aucune exigence de ce type pour régler le statut de réfugié des bénéficiaires n’a jamais été appliquée à l’UNRWA.
- Perpétuation du statut de réfugié
La définition du terme “réfugié” de l’UNRWA diffère radicalement de celle utilisée par d’autres organismes de secours aux réfugiés. Selon le mandat de l’UNRWA, la définition opérationnelle d’un réfugié de Palestine est toute personne dont “le lieu de résidence normal était la Palestine pendant la période du 1er juin 1946 au 15 mai 1948 et qui a perdu à la fois son logement et ses moyens de subsistance à la suite du conflit de 1948” – et les descendants de pères répondant à cette définition. Dans la pratique, cela signifie que le “statut de réfugié palestinien” se transmet de génération en génération.
- Le nombre actuel de réfugiés bénéficiaires de l’UNRWA
Le chiffre officiel des Arabes déplacés s’élève à 700’000 – bien que même ce chiffre soit contesté étant donné les registres du recensement de 1949 et le rapport du médiateur de l’ONU sur la Palestine qui est arrivé à un chiffre de 472’000, et a compté que quelque 360’000 réfugiés arabes seulement avaient besoin d’aide.
Indépendamment du nombre initial de réfugiés arabes de la guerre de 1948, en raison de sa politique d'”héritabilité perpétuelle du statut de réfugié”, l’UNRWA cite ce chiffre exorbitant de 5,4 millions de “réfugiés palestiniens” sous l’égide de l’UNWRA. C’est ce chiffre que l’UNRWA met en avant lorsqu’elle fait campagne pour obtenir des pays donateurs des millions de dollars supplémentaires afin de financer ses “lieux d’affectation” en Cisjordanie, à Gaza, en Jordanie, au Liban et en Syrie.
- Constatations critiques du DIOS: L’appareil de contrôle interne de l’ONU
En avril 2018, le Department of Internal Oversight Services (DIOS) (Département des services de contrôle interne de l’ONU ou Bureau des services de contrôle interne des Nations Unies) a publié son rapport couvrant un large éventail d’enquêtes sur les irrégularités de gestion et les irrégularités financières de l’UNRWA en 2017.
- Manque d’intégrité dans le processus de promotion à l’UNRWA
Parmi les problèmes cités par le DIOS (Bureau de contrôle sus-mentionné) figuraient des cas de promotion à des postes de haut niveau alors même que des fonctionnaires faisaient l’objet d’allégations de fautes graves non résolues. Il n’existait pas de cadre juridique pour traiter ces cas, ni de disposition permettant de retarder une nomination pendant que ces allégations faisaient l’objet d’une enquête. Le rapport du DIOS mentionne la nécessité de procéder à des contrôles d’intégrité – pour lesquels il n’existe actuellement aucune procédure – avant de procéder à une promotion à des postes de haut niveau. En outre, ils ont cité la nécessité pour la direction d’avoir la capacité juridique de retarder une nomination jusqu’à ce que ces doutes sur l’intégrité soient écartés et résolus. Ainsi, le spectre du copinage et du népotisme plane sur le processus de promotion et de sélection de l’UNRWA sans tenir compte des circonstances qui, pour d’autres organisations internationales, mettraient normalement un terme à de telles promotions.
- Aucun contrôle du Comité spécial sur la gestion financière ou opérationnelle
Il convient de noter que, bien que l’UNRWA dispose d’une commission consultative (AdCom), il n’a ni charte ni pouvoir d’inspecter ou d’examiner les dépenses financières et la gestion opérationnelle. En outre, il n’a pas voix au chapitre en ce qui concerne les nominations aux postes de haut niveau ou l’orientation stratégique.
En raison de cette absence de contrôles de surveillance, le rapport de l’audit du DIOS a émis la réserve suivante:
L’UNRWA semble être l’unique instance, dans le système des Nations Unies, à ne pas avoir de Conseil des gouverneurs, de Conseil d’administration ou d’organe similaire. Il semble qu’aucun autre organe de l’ONU ne se trouve dans cette situation. Pour compliquer les choses, l’UNRWA n’a pas de comité de vérification ou d’audit. Deux organes qui examinent en temps normal les opérations, inspectent les finances et approuvent les nominations aux postes de direction.
Ces graves lacunes en matière de gouvernance ont fait que l’UNRWA fonctionne à la fois au niveau de la gestion et au niveau fiscal avec un manque de transparence évident.
- Absence d’enquêtes centralisées
Comme l’a indiqué le DIOS (Bureau de contrôle interne sus-mentionné) les années précédentes, la conduite d’enquêtes décentralisées par les différents bureaux extérieurs de l’UNRWA a limité l’influence du Service de contrôle du DIOS et entravé la capacité d’entreprendre des enquêtes centralisées et objectives. Le personnel opérationnel du DIOS est donc entravé, tant en ce qui concerne les compétences techniques des enquêteurs qu’en ce qui concerne leur manque d’indépendance vis-à-vis de la direction des bureaux extérieurs.
- Augmentation de 15% des allégations d’inconduite
Le nombre total d’allégations de fautes professionnelles à l’UNRWA reçues par le Service de l’audit du DIOS a continué d’augmenter régulièrement depuis l’examen précédent, en 2004. Les cas de châtiments corporels continuent d’être le type d’allégation le plus fréquent reçu parmi tous les bureaux extérieurs, sauf en Syrie. En particulier, le nombre de violations du principe de neutralité (délégitimisation, diabolisation et enseignement de l’éducation à la guerre contre Israël) est passé de 16 en 2016 à 55 en 2017.
- Mauvaise gestion au Bureau de liaison du Caire
L’inspection par le DIOS du bureau de liaison de l’UNRWA au Caire, en Égypte, a révélé une mauvaise gestion des ressources de l’UNRWA, de fausses déclarations et une “conduite ne convenant pas à un fonctionnaire”. Suite à la publication du rapport de 2017, diverses mesures ont été prises par la direction pour rectifier la situation, mais toutes les recommandations n’ont pas été appliquées.
VII. Financement des “citoyens-réfugiés” des États hôtes
Non seulement le nombre des bénéficiaires de l’UNRWA sont gonflés par le statut susmentionné de “réfugié hérité” de tous ceux qui descendent de personnes déplacées de sexe masculin, mais aussi par une catégorie oxymoronique de “citoyens-réfugiés”. En effet, les personnes qui, au lieu de rester “sans abri”, ont obtenu la citoyenneté dans les pays d’accueil, continuent néanmoins d’être classées comme “réfugiés” ayant droit à l’aide de l’UNRWA. Cela est particulièrement vrai en Jordanie, où la grande majorité des “réfugiés” de l’UNRWA ont la citoyenneté jordanienne. Dans une moindre mesure, le même scénario se présente au Liban. De plus, cette situation de base “fondée sur le statut” pour recevoir l’aide de l’UNRWA n’a rien à voir avec un programme d’aide “fondé sur les besoins”.
Il n’existe aucune justification réelle à ce que des millions de dollars de dons servent maintenant à subventionner des bénéficiaires qui sont citoyens d’États arabes et qui peuvent tout à fait payer pour s’offrir les prestations de l’UNRWA qu’ils reçoivent.
VIII. Croissance démographique excessive
En décembre 1982, l’Assemblée générale des Nations Unies, dans le but de faire grossir le chiffre de personnes palestiniennes déplacées, a demandé à l’UNRWA de délivrer des cartes d’identité à “tous les réfugiés palestiniens dans le monde et à leurs descendants, qu’ils soient ou non bénéficiaires des rations et des services de l’UNRWA”. Avant cette résolution, les cartes d’identité de l’UNRWA étaient délivrées “par famille”. Parmi les aspects importants de cette résolution, le chiffre de la population des bénéficiaires de l’aide de l’UNRWA a été fixé à 1,9 million de personnes. Pourtant, le chiffre de 2019 utilisé par l’UNRWA pour convaincre les pays donateurs de la nécessité d’augmenter leurs dons à l’UNRWA est de 5,4 millions – soit une augmentation de 280% – beaucoup plus élevé que celui de l’Égypte et de la Syrie voisines et plus du double de celui des pays occidentaux industrialisés au cours des mêmes 37 années.
- Le nombre de Palestiniens dans le monde est inférieur aux prévisions
Pour aider à la mise en œuvre de la résolution susmentionnée, il a été demandé aux gouvernements du monde entier de faire un rapport sur leurs résidents palestiniens. Sur les quelques réponses reçues, le total de ces personnes était inférieur à 500. A la lumière de ces chiffres étonnamment bas annoncés par les gouvernements du monde entier, le Secrétaire général des Nations Unies a déclaré qu’il était “incapable, à ce stade, de poursuivre la mise en œuvre de la résolution”.
- Budget gonflé, personnel gonflé
Le budget de 1,2 milliard de dollars de l’UNRWA est disproportionné par rapport aux bénéficiaires qu’il dessert. En revanche, le budget 2019 du HCR – l’agence de secours de l’ONU au service de toutes les autres personnes déplacées de tous les autres conflits dans le monde – est de 8,6 millions de dollars. Il faut noter que le HCR finance les efforts de secours pour 20,4 millions de réfugiés – soit quatre fois le nombre estimé de bénéficiaires de l’UNRWA et 11 fois plus que le nombre actuel de réfugiés enregistrés – sur ce budget relativement maigre. Ainsi, l’UNRWA dispose d’environ 530 à 1500 dollars par réfugié pour chaque dollar dont dispose le HCR.
De même, les effectifs pléthoriques de l’UNRWA défient toute logique: 30’000 employés sont inscrits sur la liste de paie de l’UNRWA, mais environ la moitié de ce nombre – 16’800 – est inscrite sur la liste des employés payés par le HCR.
- Opposition des entrepreneurs au plan de reconstruction MRG
Il y a cinq ans, un accord a été conclu entre Israël, l’ONU et l’Autorité palestinienne (appelé le Mécanisme de reconstruction de Gaza, ou “MRG”) en vertu duquel les zones de Gaza déchirées par la guerre devaient être reconstruites et les “matériaux de construction essentiels” devaient être autorisés à entrer à Gaza. Les objections de nombreuses organisations palestiniennes ont fait échouer l’accord. Néanmoins, l’UNRWA a réclamé des dépenses d’aide au logement pour plus de 11’000 familles dans le cadre de son budget, et a affirmé en outre qu’il coordonnait des dizaines de projets d’infrastructure de l’UNRWA.
XII. Appels d’offres aux entrepreneurs par l’UNRWA
Parmi les exigences relatives aux appels d’offres pour les projets d’infrastructure de l’UNRWA en Jordanie et à Gaza, le contractant doit être “membre de l’Union palestinienne des entrepreneurs”. Aucune autre agence des Nations Unies ne dispose de telles clauses d’exclusion conçues pour favoriser un consortium commercial particulier. Cela soulèverait des questions de fair-play et de concurrence ouverte, en violation des propres “Principes directeurs de l’ONU sur l’assistance humanitaire de 1991”. Plus troublant encore, Israël a identifié 40% de ces entrepreneurs comme étant à risque pour la sécurité, auxquels des projets ne devraient pas être attribués ni du matériel à double usage transféré.
XIII. La dérive des dépenses de l’UNRWA
Des projets de “construction d’un mur de soutènement” ou d’une énième “infrastructure de camp” sans fin ou de travaux de “rénovation” sont cachés dans le “budget de l’éducation” de l’UNRWA, par ailleurs impressionnant – laissant entendre aux donateurs que toutes ces dépenses sont dédiées à des livres, aux enseignants et aux salles de classe plutôt que pour des entrepreneurs bien au courant sur les manières de faire.
David Bedein est directeur de l’Agence de presse des ressources israéliennes au Centre de recherche sur les politiques du Proche-Orient.
Traduction: emet.translate